L’Affaire des vivants
Christian Chavassieux
Charlemagne Persant, né au milieu du dix-neuvième siècle dans une ferme pauvre de la région lyonnaise, aurait dû avoir la vie toute tracée d’un paysan désargenté. C’était sans compter sur son grand-père qui, persuadé de l’inverse, allait forcer le destin en donnant à l’enfant un étonnant prénom d’empereur. À lui répéter si souvent que sa destinée serait exceptionnelle, il développa chez lui un charisme qui plia le monde à son bon vouloir. Son sens aigu du commerce et sa froideur lui dicteront au fil des années une ligne de conduite inflexible qui le conduiront, y compris par un mariage bien au dessus de son rang, à gravir tous les échelons. Jamais l’empathie, le remords ou la compassion n’auront de place dans ses choix. Jamais sinon peut-être pour une prostituée aussi noire de peau qu’il l’était de cœur et pour laquelle il fera preuve de la seule tendresse dont il fut capable un jour. À ne rien donner, on ne transmet pas non plus sinon la ruine et le malheur. Les amours manquées, sel de toutes les vies, feront de la fin de Charlemagne, véritable Vulcain, un brasier bien cruel. Femme et enfant tenteront d’exister au-delà même de son souvenir. L’Affaire des vivants, formidable évocation d’un destin hors norme, saga historique de la France de la fin du dix-neuvième siècle, a tous les ingrédients de la tragédie classique. L’échec, par manque d’amour et quel que soit la puissance, se cache derrière les réussites.
Sous forme d’une fresque historique et de la destinée hors norme d’un prodige, on suit la vie d’un fils de paysan qui, rongé par l’ambition, atteindra les sommets de la bourgeoisie lyonnaise à la fin du dix-neuvième siècle. Mais à vivre sans amour, même avec la force et la puissance des bâtisseurs, on ne fabrique que des chimères et des murs sans ciment. Plus dure sera la chute.