Maman, la nuit
Sara Bourre
En lisière de la forêt vivent une mère et son enfant. On ne les apprécie pas au village. Les médisances des femmes courent de balcon en balcon. Les hommes défilent chez elles, surtout la nuit.
L’enfant observe tout et avant toute chose sa mère, une fascination qui oscille entre haine et passion, dont on sent le danger, la menace, la violence des sentiments enfouis.
C’est une enfant sale, étrange. Elle a grandi robuste, comme une mauvaise herbe. Elle sent, perçoit, palpe, capte, traque, à l’affut, toujours tapie. Elle est poreuse. Parfois, sa propre noirceur l’envahit; ces jours là, les jours gris, elle fait des accidents.
Un jour, sa mère disparait.
Que va-t-elle devenir?
Avec ses propre rituels, une voix nous parle depuis l’enfance; les mots des adultes y ouvrent des brèches, laissent des cicatrices, une entêtante litanie. La voix d’une enfant sauvage, sombre et blessée, dangereuse et fragile, soudain livrée à elle-même.