Le célèbre slogan Faites l’amour, pas la guerre était un peu simpliste, mais il correspondait néanmoins à une belle ambition : partager librement et avec enthousiasme l’amour et l’érotisme, plutôt que de soumettre âmes et corps à l’aliénation de la guerre – que celle-ci soit patriotique, familialiste ou économique.
C’est cette ambition actualisée que cherche ici à soutenir Yann Kerninon. Pour lui, l’érotisme (ce mélange de sexualité et d’émoi amoureux) doit être le fondement d’une libération des individus et des sociétés, et peut aussi être la source d’un sens de la vie.
Rejetant dos à dos le conformisme du couple traditionnel et une vision de la « liberté sexuelle » faussement transgressive (pornographie, échangisme), l’auteur élabore une définition audacieuse de l’amour et de la possibilité d’une « libération amoureuse » : audacieuse, parce qu’assumant pleinement la mise en danger et la part d’incertitude qu’implique toujours la rencontre de l’autre, sa part de risque, la seule capable de nous troubler, de nous transformer profondément – la seule, en somme, qui vaille la peine d’être vécue. La seule, aussi, qui soit authentiquement révolutionnaire.
À l’image du funambule, l’amoureux avance joyeusement et prudemment vers l’inconnu. Pour être pleinement vécu, l’amour doit toujours rester ce à quoi nous ne nous attendions pas ; cette incertitude nous oblige à être pleinement et intensément humains.